Haïti face au défi de la faim : le FMI et le PAM tirent la sonnette d’alarme

Alors que la faim recule lentement dans une partie de l’Amérique latine, Haïti demeure le pays le plus durement touché de la région. Selon un rapport du Fonds monétaire international (FMI) et de l’Institut interaméricain de coopération pour l’agriculture (IICA), il faudrait à Haïti investir l’équivalent de 13 % de son produit intérieur brut (PIB) pour éradiquer la faim — un chiffre sans équivalent dans la région.

Crédit photo : PAM

Port-au-Prince, le 12 octobre 2025._Le rapport intitulé « Combien coûterait l’élimination de la faim en Amérique latine et dans les Caraïbes ? » met en évidence un contraste saisissant : 70 % des pays de la région pourraient éradiquer la faim en investissant moins de 1 % de leur PIB, tandis qu’Haïti, lui, devrait mobiliser un effort treize fois supérieur.

Cette réalité place le pays au sommet des urgences humanitaires du continent, selon les auteurs de l’étude, Eugenio Díaz-Bonilla (IICA) et Tewodaj Mogues (FMI).

Une pauvreté structurelle aggravée par la crise

L’ampleur du défi haïtien s’explique par un cumul de fragilités :

Instabilité politique persistante, bloquant toute politique publique cohérente ;

Inflation galopante, qui ronge le pouvoir d’achat des ménages ;

Incapacité de l’État à soutenir la production agricole ;

Et insécurité chronique, qui paralyse les échanges entre zones rurales et marchés urbains.

Autrement dit, la faim en Haïti n’est pas une fatalité naturelle, mais le symptôme d’un effondrement de la gouvernance et de la production nationale.

Un pays agricole dépendant des importations

L’IICA rappelle que l’Amérique latine et les Caraïbes produisent une tonne de nourriture sur quatre dans le commerce international, preuve qu’il existe assez de ressources pour nourrir toute la population régionale.
Pourtant, Haïti, pays à vocation agricole, importe plus de la moitié de ce qu’il consomme. La dépendance aux importations, combinée à la dépréciation de la gourde, aggrave l’insécurité alimentaire et fragilise les familles rurales.

Des chiffres qui font froid dans le dos

Le rapport souligne que 44 millions de personnes souffrent de la faim dans la région, dont plus de 20 % de la population haïtienne.

2 pays enregistrent une prévalence de la faim d’au moins 20 %, dont Haïti ;

Voyage Haïti

5 pays se situent entre 10 et 20 % ;

10 pays entre 5 et 10 %.

Autre donnée préoccupante : 182 millions de personnes n’ont pas les moyens d’accéder à une alimentation saine. Pour Haïti, cela se traduit par une malnutrition chronique, une baisse de productivité et un cycle de pauvreté difficile à briser.

Une question de volonté politique

Selon le FMI et l’IICA, la clé réside dans une meilleure utilisation des ressources. Deux pistes sont proposées :

Mieux cibler les dépenses sociales pour atteindre les familles réellement vulnérables ;

Réaffecter les subventions régressives — souvent captées par les plus aisés — vers des programmes d’aide alimentaire ou de soutien agricole.

Le directeur général de l’IICA, Manuel Otero, insiste : « Sans agriculture, il ne peut y avoir de sécurité alimentaire. »
Il appelle à une meilleure coordination entre les ministères de l’Agriculture et des Finances afin de replacer la souveraineté alimentaire au cœur des politiques nationales.

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