
par Gandhi LeMetronome Dorsonne
Il y a ceux qui parlent de changement dans des studios climatisés. Et il y a Troubleboy Hitmaker, qui depuis plus d’une décennie transforme ses paroles en actes concrets. Chaque année, 10 % de ses revenus financent directement l’éducation d’élèves défavorisés du Cap-Haïtien. Pas de bureaucratie, pas de discours creux : juste un engagement qui se matérialise par des bourses d’études et, depuis quatre ans, par un événement devenu légendaire : Blue & White.

Le 16 août dernier, Devan Gwog sur le Boulevard du Cap-Haïtien a vibré d’une énergie particulière. À 2500 gourdes l’entrée, un prix accessible qui démocratise l’accès à la culture, ce n’était pas seulement un concert, c’était un manifeste.

*Le micro devient arme de construction massive*
Des milliers de spectateurs de tout acabit et d’horizons divers ont convergé vers cette soirée orchestrée par Gran Plante System. Kenny Haïti, Steves J. Bryan, Pierre-Jean ont illuminé la scène aux côtés du maître des lieux, pendant que Manitonation, DJ Touch, HBMiX, DJ Peter et Majesty assuraient les entractes. Mais dès ses premiers mots au micro, Troubleboy Hitmaker a posé le ton :
« Sans vous, je ne suis rien. »
Une phrase qui résonne comme une gifle dans un milieu où l’ego règne en maître absolu.
*Le roi partage sa couronne*
Dans une industrie où chacun défend jalousement son territoire, Troubleboy Hitmaker a choisi la voie inverse : le partage. Sa performance a intégré les créations de Baky Popilè, Fatima Altieri et Toby, trois talents qui auraient pu être ses concurrents directs, mais qu’il a préféré porter sur sa scène pour promouvoir leurs singles, concerts et albums fraîchement sortis.
Cette générosité artistique va bien au-delà du geste symbolique. Dans un milieu où la compétition pousse souvent à l’exclusion, Troubleboy Hitmaker transforme sa plateforme en ascenseur pour ses pairs. Il prouve qu’un vrai leader ne craint pas la concurrence : il la cultive, sachant que l’excellence collective élève tout le secteur.
*Le nouveau face aux anciens codes*
Pendant que certains groupes établis Septentrional, Tropicana, et désormais Klass et Nu Look s’accrochent aux traditions des fins de bal comme à un privilège inaltérable, Troubleboy Hitmaker invente son propre modèle. Sa force ne réside pas dans la fermeture d’une soirée, mais dans l’ouverture des possibles.
Son ambition post-concert le confirme :
« Mon objectif : scolariser encore plus d’élèves et équiper une école locale d’une salle informatique complète. »
Là où d’autres calculent leurs cachets, lui programme l’avenir de sa communauté.
*Au-delà du spectacle*
Si le HMI est devenu un véritable champ de bataille où haine et coups bas font partie des règles du jeu, Lord Wensky Jolissaint montre qu’on peut rester humain, Ayisyen avant d’être artiste. Ce soir d’août au Cap, la musique s’est muée en outil de transformation sociale, l’artiste en architecte du changement.
La véritable subversion ne viendrait-elle pas de cette approche ? Un roi qui gouverne par l’exemple, qui transforme sa popularité en levier d’émancipation collective, prouvant qu’on peut régner tout en servant sa nation.
Dans un paysage saturé de postures et de rivalités toxiques, la star fils du Cap-Haïtien, digne héritier de la fierté christophienne, dessine les contours d’un leadership authentique : celui qui mesure sa grandeur à l’aune de ce qu’il apporte aux autres, qui place l’humanité et l’identité haïtienne au-dessus des querelles d’ego